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Contribution à la sécurité alimentaire

En quoi les productions agricoles contribuent-elles à la sécurité alimentaire ?

La sécurité alimentaire est définie selon la FAO par quatre dimensions : la disponibilité en aliments, l’accès à la nourriture, la stabilité de l’approvisionnement et la capacité d’utilisation. Les productions agricoles contribuent à la dimension « disponibilité en aliments » grâce à la quantité et à la qualité des aliments qu’elles produisent que ce soit en termes de protéines ou d’énergie.

Cependant, si les productions végétales permettent de produire des aliments consommables par l’homme, les animaux, pour y parvenir, doivent consommer des ressources végétales dont une partie pourrait être valorisée directement en alimentation humaine. C’est notamment le cas des céréales. On parle alors de compétition « feed-food ». Plus largement, les productions animales mobilisent une certaine part de la superficie agricole, du fait de leur utilisation de prairies ou de terres labourables pour produire les aliments entrant dans leur alimentation. On parle alors de compétition pour les terres. En raison des pertes métaboliques, les animaux produiront toujours moins d’aliments que ce qu’ils consomment. De ce fait, pour nourrir la planète, il est plus efficient de diriger les aliments consommables par l’Homme vers l’alimentation humaine et de maximiser leur présence dans les assolements.

Cependant, les animaux ont la capacité de valoriser des ressources non-consommables par l’Homme, telles que les fourrages, les résidus de cultures ou les coproduits des industries agroalimentaires. Ils peuvent aussi mobiliser des surfaces non-cultivables, telles que les prairies permanentes ou les prairies naturelles, favorisant ainsi l’entretien et le maintien de la biodiversité de ces surfaces. Les terres labourables peuvent également accueillir des cultures à fonction agronomique, comme les prairies temporaires, que l’on peut destiner à l’alimentation animale. En transformant ces matières premières non-consommables par l’Homme en produits animaux, les productions animales peuvent contribuer de manière positive à la sécurité alimentaire. Il est donc crucial de prendre en considération ces éléments dans l’évaluation de la multi-performance des exploitations et, plus globalement, dans la réflexion sur nos modes de production. La contribution à la sécurité alimentaire des productions animales est généralement représentée en termes de protéines contenues dans les aliments mais elle peut aussi être calculée en termes d’énergie.

Pourquoi intégrer cette approche dans DECiDE ?

La production de denrées alimentaires pour subvenir aux besoins de l’homme, qui représente un des services écosystémiques des systèmes agricoles, reste une priorité pour l’agriculture. L’intégration du potentiel nourricier dans DECiDE permet de mettre en regard cet indicateur avec les impacts environnementaux, économiques et sociaux liés à la production agricole.

Par ailleurs, l'un des aspects controversés de la production animale est la compétition pour les aliments consommables par l’Homme et pour les terres agricoles, ce qui nécessite un changement dans l'alimentation animale et dans l'agriculture européenne de manière plus générale. Intégrer cette approche de la compétition feed/food dans DECiDE permet de quantifier la contribution des ateliers d’élevage à la dimension « disponibilité » de la sécurité alimentaire.

Quels indicateurs et comment les interpréter ?

Le potentiel nourricier

Le potentiel nourricier à l’échelle de l’exploitation est calculé de la manière suivante :

\[ \text{Potentiel nourricier en protéines} = \frac{\text{Quantité nette de protéines produites par l'exploitation}}{\text{Besoins moyens en protéines d'un humain wallon}} \]

Avec

\[ \text{Quantité nette de protéines produites par l'exploitation} = \text{Quantité de protéines consommables par l'homme produites par les animaux} - \text{Quantité de protéines consommables par l'homme et consommées par les animaux} + \text{Quantité de protéines consommables par l'homme et produites par les cultures de vente} \]

Les besoins moyens d'un habitant wallon ont été évalués en tenant compte des besoins moyens de chaque catégorie de la population (Conseil supérieur de la santé belge), pondérés par leur proportion en Wallonie (Statbel).

Le potentiel nourricier est calculé à l’échelle de chaque atelier en ne prenant en compte que la quantité nette de protéines consommables par l’homme produite par l’atelier considéré à savoir :

  • Pour l’atelier cultures de vente, la quantité de protéines consommables par l’homme produites par les cultures de vente ;

  • Pour les ateliers animaux, la différence entre les protéines consommables par l’homme et produites par les animaux et les protéines consommables par l’homme et consommée par les animaux.

L’efficience nette de conversion des protéines

Pour représenter la compétition feed/food, l’efficience nette de conversion a été privilégiée dans DECiDE, afin de prendre en compte la part des aliments consommables par l’homme.

Cet indicateur est calculé à l’échelle de chaque atelier animal de la manière suivante :

\[ \textit{Efficience nette de conversion des protéines} = \frac{\textit{Quantité de protéines consommables par l'homme produites par les animaux}} {\textit{Quantité de protéines consommables par l'homme et consommées par les animaux}} \]

Si cet indicateur est supérieur à 1, cela signifie que l’atelier produit plus de protéines qu’il n’en consomme. Plus ce chiffre est élevé et plus l’atelier utilise des denrées non consommables par l’homme. En revanche, s’il est inférieur à 1, cela signifie que cet atelier entre en compétition directe avec la production d’alimentation humaine.

Toutefois, les exploitations affichant les meilleures performances pour cet indicateur peuvent potentiellement utiliser de grandes quantités de terres. Les terres arables mais aussi les pâturages étant des ressources limitées, l'efficacité avec laquelle ils sont utilisés par les systèmes animaux représente une deuxième approche pour évaluer leur contribution à la sécurité alimentaire.

Productivité nette en protéines :

En effet, afin de limiter sa compétition avec la production de denrées pour l’alimentation humaine, l’élevage doit produire en mobilisant prioritairement la surface dite non-consommable par l’homme.

L’indicateur de productivité nette (Battheu-Noirefalise et al., 2023) permet de prendre en compte cette efficacité de production. Il est lui aussi calculé à l’échelle de chaque atelier animal de la manière suivante :

\[ \text{Productivité nette en protéines} = \frac{\text{Quantité nette de protéines produites par l'élevage}} {\text{Surfaces non consommables mobilisées par l'élevage}} \]

\[ \text{Quantité nette de protéines produites par l'élevage} = \text{Quantité de protéines consommables par l'homme produite par les animaux} - \text{Quantité de protéines consommables par l'homme et consommées par les animaux} \]

Si cet indicateur est supérieur à 0, cela signifie que l’atelier est producteur de protéines consommables par l’homme. Au plus la valeur prise par cet indicateur est élevée, au plus la productivité de l’atelier en protéines comestibles est élevée. Si cet indicateur est négatif, cela signifie que l’atelier est consommateur de protéines comestibles.

Attention toutefois d’interpréter conjointement les deux indicateurs (efficience nette de conversion et productivité nette), permettant ainsi de réfléchir au meilleur compromis entre l’utilisation d’aliments en compétition avec l’Homme et l’utilisation de terres agricoles. En effet, un atelier peut avoir une efficience nette de conversion élevée mais une productivité nette faible. Cela signifie qu’il n’est guère en compétition vis-à-vis de l’alimentation humaine, mais qu’il est peu productif à la surface. C’est le cas par exemple d’un atelier laitier qui va nourrir ses animaux presqu’exclusivement à l’herbe avec une gestion extensive. Augmenter la production à la surface de ce type d’élevage est une possibilité à évaluer selon les conditions pédoclimatiques et à mettre en lien avec les durabilités économique, environnementale et sociale de l’élevage.

Quelques chiffres

Au sein des fermes de références de DECiDE, les niveaux moyens de contribution à la sécurité alimentaire des exploitations et de leurs ateliers sont les suivants :

Exploitation Nombre Potentiel nourricier en protéines Efficience nette de conversion en protéines Productivité nette en protéines
Exploitation 196 700 - -
Atelier Cultures de vente 111 0.32 - -
Atelier bovins lait 124 881 4.9 243.6
Atelier bovins viande 115 35.4 1.7 14.7

Leviers d’action

Si l’agriculteur souhaite améliorer son potentiel nourricier, de manière générale, cela passe par l’augmentation de la productivité sur sa ferme, ce qui peut avoir des effets délétères sur un ou plusieurs piliers de la durabilité.

Cependant, si l’agriculteur dispose d’un ou plusieurs ateliers animaux, l’amélioration de son potentiel nourricier et donc de sa contribution à la sécurité alimentaire peut aussi passer par la diminution de son niveau de compétition avec l’alimentation humaine. Pour cela, l’éleveur doit réduire la part d’aliments consommables par l’homme dans la ration de ses animaux tout en valorisant au mieux les surfaces prairiales disponibles. Plusieurs leviers peuvent être activés à cette fin :

  • Optimiser le pâturage (type de pâturage adapté : tournant, dynamique... – organisation du parcellaire – adaptation du chargement à la pousse de l’herbe - bonne gestion des entrées et sorties de parcelles - implantation de légumineuses - adaptation de la complémentation en prairie...)

  • Améliorer la production de fourrages en quantité et en qualité (optimiser le stade de récolte de l’herbe - réfléchir le choix des mélanges en relation avec les conditions pédoclimatiques - implantation d’intercultures valorisables par le bétail - production de fourrages variés assurant un équilibre entre la production de protéines et d’énergie fourragères...)

  • Valoriser les intercultures

  • Avoir recourt aux coproduits (tourteaux d’oléagineux, drèches de brasserie, pulpes de betteraves, drèches d’éthanol…).

  • Améliorer la gestion de son troupeau (optimisation de l’alimentation pour limiter le gaspillage, meilleure adéquation de la ration au potentiel de production des animaux, adaptation de la taille du troupeau aux surfaces disponibles, limiter les phases improductives des animaux...)

Pour aller plus loin

  • Battheu-Noirfalise C., Mertens A., Froidmont E., Mathot M., Rouillé B. & Stilmant D. (2023). Net productivity, a new metric to evaluate the contribution to food security of livestock systems: the case of specialised dairy farms. Agron. Sustain. Dev. 43(4), 54. DOI:10.1007/s13593-023-00901-z
  • FAO (2013). Dietary protein quality evaluation in human nutrition: report of an FAO expert consultation, 31 March - 2 April 2011, Auckland, New Zealand. FAO, Rome, Italy. ISBN 978-92-5-107417-6. Lien vers le document
  • Ferial J. (2024). L’élevage des ruminants et l’alimentation des animaux. Lien vers le document
  • Laisse S., Rouillé B., Baumont R. & Peyraud J.-L. (2016). Evaluation de la contribution nette des systèmes bovins laitiers français à l'approvisionnement alimentaire protéique pour l'être humain. Rencontres Recherche Ruminants. 23, 263-266. Lien vers le document
  • Laisse S., Baumont R., Dusart L., Gaudré D., Rouillé B., Benoît M., Veysset P., Remond D. & Peyraud J.-L. (2019). L’efficience nette de conversion des aliments par les animaux d’élevage : une nouvelle approche pour évaluer la contribution de l’élevage à l’alimentation humaine. INRA Productions Animales, 31 (3), pp.269-288. DOI:10.20870/productions-animales.2018.31.3.2355.